Les libertés syndicales restent à conquérir
le 30.04.14
Plusieurs syndicats autonomes prévoient de réunir, dans les prochains
jours, leurs structures respectives à l’effet de débattre des actions et
des décisions à prendre concernant leurs revendications.
Si dans les pays dits démocratiques, la Fête du travail se veut
festive, en Algérie celle-ci sera célébrée dans un contexte, encore une
fois particulier, de tension sociale liée aux préoccupations des
salariés en matière d’emploi, de conditions de travail et de violation
des droits syndicaux. Les promesses avant l’élection présidentielle par
les pouvoirs publics aux travailleurs de certains secteurs demeurent
toujours hypothéquées. Du coup, le risque d’une explosion sociale
planera toujours sur le pays. C’est à ce titre que beaucoup de syndicats
autonomes prévoient de réunir, dans les prochains jours, leurs
structures respectives à l’effet de débattre des actions et des
décisions à prendre.
Les pouvoirs publics n’ont jamais amorcé ni négocié un vrai dialogue
autour des revendications socioprofessionnelles des travailleurs.
Surtout avec les syndicats autonomes qui, malgré leur forte mobilisation
dans nombre de secteurs, restent ignorés par le pouvoir politique. Sauf
rares exceptions, depuis la promulgation de la loi 90-14 régissant
l’activité syndicale et le dialogue social en Algérie, le mouvement
syndical autonome a toujours buté sur le refus des pouvoir publics
d’ouvrir un dialogue comme le stipulent pourtant les lois sociales.
En dépit de ces textes de loi, le pluralisme syndical dans notre pays
demeure de façade. Un leurre. Le monopole revient au syndicat du
pouvoir, l’UGTA. Pourtant, les Snapap, SNPSP, CLA, CNES, Snapest,
Cnapest, Satef, pour ne citer que ceux-là, sont présents dans
pratiquement tous les domaines d’activité et sont souvent plus combatifs
que les organes de l’UGTA. Cependant, la liberté de manœuvre et de
décision de ces syndicats autonomes dérange le pouvoir, qui préfère
mettre en scène le dialogue social de façade duquel les travailleurs
restent très largement absents.
Clonage
«La pratique syndicale en Algérie va très mal», résume Yamina Meghraoui
du Snapap qui, pour illustrer cet état de fait, appelle, à la veille du
1er Mai, à la réintégration des syndicalistes du secteur de la justice
suspendus depuis deux ans et privés de leurs droits sociaux (salaire,
allocations familiales et sécurité sociale). Plusieurs syndicalistes ont
été poursuivis en justice ou suspendus arbitrairement ces dernières
années. Leur seul tort : leur appartenance à des syndicats autonomes.
Les syndicats autonomes sont diabolisés. La syndicaliste du Snapap
pousse le triste constat plus loin : «Il y a un problème de restriction
des libertés de façon générale, une atteinte aux libertés
démocratiques.»
Pour le président de SNPSP, le combat est encore très long : «On ne
s’attend pas à grand-chose par rapport aux libertés syndicales.»
S’il est vrai que sur le terrain, les syndicats autonomes ont toujours
réussi leur démonstration de force, ils ne sont cependant pas encore
parvenus à constituer un véritable front d’opposition. Le pouvoir a,
jusque-là, réussi à affaiblir leur action unitaire. «Le problème est
qu’il y a un clonage de syndicats autonomes, à chaque fois qu’un
syndicat s’impose on lui crée un frère jumeau. On fragilise les
syndicats en remettant en doute leur efficacité», analyse Yamina
Meghraoui.
Le premier responsable du Snapest, Meziane Meriane, pour qui «les
libertés syndicales dans notre pays n’évoluent pas», préfère parler de
«verrouillage de la part du pouvoir central». «Au niveau des relations
de travail entre l’administration et les salariés, la liberté
d’appartenance et l’activité syndicale constituent la pierre angulaire
de l’exercice concret du droit syndical. Chez nous, il n’est que
théorique», a-t-il regretté. Ainsi, pour lui, «le recours à l’arsenal
juridique et aux ponctions sur salaire des fonctionnaires lors des
actions de protestation réduit à zéro l’activité syndicale». Il estime
qu’«il ne sert à rien de proclamer le droit syndical sans reconnaître
aux syndicats les moyens de leur action, pourtant garantis par la
convention 87 du BIT, ratifiée par notre pays en 1962». Meziane Meriane
qualifie, par ailleurs, la situation sociale actuelle de «peu reluisante
malgré les augmentations salariales» car «le pouvoir d’achat est
toujours laminé par une inflation galopante incontrôlée».
Rabah Beldjenna
Enregistrer un commentaire