Entre Syrie & Palestine… le prix Nobel de la Paix pose ses choix.
Par Daniel Vanhove
Une fois de plus, nous voici conviés par l’ainsi nommée
« Communauté internationale » à un nouvel épisode d’un scénario dont
elle aime nous gaver et semble prendre plaisir : jouer à se (nous) faire
peur. Chaque soir, les journalistes attitrés nous abreuvent de
commentaires usés jusqu’à la corde et les habituels « experts » se
pressent sur les plateaux, trop heureux de faire la « une » pour étaler
leurs théories funestes. Les uns élaborent des plans et nous expliquent
déjà leur vision tactique des choses, les autres s’interrogent chiffres à
l’appui, pour savoir si le pouvoir syrien aura les moyens de se
défendre. D’aucuns parlent même d’une 3è guerre mondiale possible… Ces
irresponsables, confortablement installés, s’excitent tous seuls comme
de grands enfants jouant sur internet…
Aujourd’hui, les habituels va-t-en-guerre occidentaux, regard sévère
et mâchoires serrées, déclarent vouloir « punir » le régime syrien pour
l’usage d’armes chimiques dont personne ne sait encore si elles sont le
fait du régime ou de quelque faction rebelle… Le devoir de réserve
devrait donc dicter à ces « démocrates » un minimum de retenue, et
attendre les conclusions des inspecteurs de l’ONU… en espérant que
celles-ci soient neutres et objectives. Et dans le cas contraire, celui
où l’opposition serait reconnue coupable d’utilisation d’armes
chimiques, que fera la « Communauté internationale » ? Qui
« punira »-t-elle et comment ?…
Face à ces gesticulations de mauvais gout, où certains semblent
confondre virtuel et réalité, et avant toute précipitation, ne
faudrait-il pas tirer les leçons de nos terribles erreurs passées et des
sinistres conséquences de manipulations médiatiques qui nous ont
trompés ?
Il y a quelques années, tournaient en boucle des images du (faux) vol
des couveuses à Koweït-city. Ensuite, celles de Colin Powell agitant
devant le monde entier sa petite fiole censée contenir une arme de
destruction massive jamais trouvée en Irak. Après, il fallait éradiquer
les Talibans en Afghanistan, de mèche dans les attentats du 11
septembre. Et dernièrement, les effets de manches de BHL en Libye, avec
les suites que l’on sait… Résultats de nos dernières
interventions directes : l’Irak est dévasté par des attentats quotidiens
et devenu quasi incontrôlable; l’Afghanistan est à nouveau aux mains
des Talibans et le gouvernement du fantoche H. KarzaÏ doit composer avec
eux ; la Lybie est plus divisée que jamais… Sans parler de la Syrie
dont les rebelles de la première heure sont dépassés par des milices
extrémistes et des djihadistes – que nous armons dans le cas présent
mais combattons en d’autres lieux (comprenne qui pourra !) – venus de
toutes parts dans un pays en ruines, où l’on dénombre plus de cent mille
morts…
Faut-il encore y ajouter nos bombardements et missiles sophistiqués,
alors qu’on ne compte déjà plus les populations réfugiées, ayant tout
perdu… Quand donc aurons-nous compris et intégré dans nos esprits
belliqueux que la guerre n’est pas une solution à la guerre, et
qu’ajouter des destructions aux destructions ne mène qu’à plus de
chaos !? Et comme l’osent quelques voix discordantes : une nouvelle
guerre, pour quoi faire !? Voilà des années que l’on nous répète que les
caisses de nos Etats sont vides, qu’il faut se serrer la ceinture, que
les allocations sociales sont revues à la baisse, que nos dettes sont
devenues une charge impayable au risque d’hypothéquer l’avenir de nos
enfants… Mais étrangement, et malgré le coût exorbitant que cela
représente, il y a toujours assez d’argent pour aller guerroyer sous de
fallacieux prétextes ! De qui se moque-t-on !?
Pour mémoire, faut-il rappeler que les USA ont déversé des millions
de litres de l’agent orange sur le Vietnam produisant toujours leurs
effets dévastateurs sur les populations locales, sans que l’on entende
personne s’en indigner !?… Sont-ils vraiment les mieux placés pour
donner des leçons de moralité aux autres gouvernements ?…
Et si dans la foulée, l’on voulait bien se souvenir de l’utilisation
d’armes à l’uranium appauvri par Israël lors de son opération « Plomb
durci » à Gaza contre la population palestinienne en 2009. Ayant fait
plus de 1.400 victimes dont de nombreux enfants, soit plus que ce dont
il est question dans l’attaque chimique en Syrie… Cela a-t-il mené à une
intervention punitive même « ciblée » de nos pays contre l’Etat
sioniste ? Or, selon le Droit international sur le contrôle des
armements, les armes à l’uranium appauvri sont elles aussi illégales
(conventions de La Hague de 1899 et 1907, de Genève de 1925 et 1949,
Charte de Nuremberg de 1945, convention des Nations-Unies du 10 octobre
1980, dite « Convention des armes inhumaines »). A moins d’amnésie, il faut donc constater qu’une nouvelle fois nos « exemplaires démocraties » occidentales à géométrie variable exercent
encore et toujours leur détestable deux poids, deux mesures et bafouent
allègrement tout principe d’une vraie justice, s’appliquant à tout le
monde et de manière équitable.
Si nous étions de vrais démocrates, notre principale préoccupation
devrait porter sur les populations systématiquement victimes de ces
manœuvres cyniques. Car il en est toujours de même, des gens perdent
tout : habitation, boulot, famille et proches, santé, et sont jetés à la
rue où tant bien que mal, ils fuient ces zones mortifères pour aboutir
au mieux dans des camps de réfugiés souvent insalubres et dont on sait
que pour certains, ils seront pérennes…
Si nous étions de vrais démocrates, nous ne mettrions pas tant
d’intelligence, de recherche scientifique et d’argent à sophistiquer des
armes toujours plus létales au seul profit du lobby de l’armement qui
pousse à la moindre occasion pour tester ses abjectes nouveautés « sur
le terrain », mais dépenserions toute cette énergie pour préserver la
vie et l’environnement qui l’abrite !
Si nous étions de vrais démocrates, nous nous interdirions de
« punir » des gouvernements par des interventions armées qui toujours
massacrent des civils, mais suivrions les procédures du Droit
international pour traduire les responsables devant les tribunaux et les
cours de justice prévues pour cela.
Enfin, devant tant d’inconséquences de nos gouvernements, il est une
question dérangeante sans doute mais inévitable : n’y a-t-il pas
derrière tout cela, une détestation profonde de nos pays occidentaux
pour tout ce qui est de peau basanée et de culture musulmane ? Tant
d’iniquités dans le traitement des affaires du monde ne révèle-t-il pas
une haine profonde de la culture arabe ?… Et avec la carte de la région
sous les yeux, comment ne pas voir que l’Irak, l’Afghanistan, la Syrie,
le Liban, la Libye, l’Egypte, la Tunisie… tous pays situés à proximité
d’Israël , sont considérablement saccagés, meurtris, affaiblis et dès
lors plus divisés que jamais ?… au plus grand profit de l’Etat israélien
renforcé par ces effondrements successifs, et poursuivant ainsi sa
politique d’apartheid et de colonisation rampante de la Palestine, sans
que personne ne songe à « punir » cet Etat voyou !
Divide et impera (Diviser pour mieux régner) disaient déjà les
Romains… Le président Obama, « Prix Nobel de la Paix » va-t-il y ajouter
son imprimatur en Syrie ?
« Devant les perspectives terrifiantes qui s’ouvrent à
l’humanité, nous apercevons encore mieux que la paix est le seul combat
qui vaille la peine d’être mené, ce n’est plus une prière, mais un ordre
qui doit monter des peuples vers les gouvernements, l’ordre de choisir
définitivement entre l’enfer et la raison ». Albert Camus
Daniel Vanhove
Observateur civil et auteur
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