ELWATAN-ALHABIB
samedi 29 septembre 2012
 

La liberté citoyenne prise en otage entre un Etat gangster et une presse receleuse.




Abdelkader DEHBI.
Universitaire
Je ne connais pas M. Mohamed Samraoui, l’ex-colonel du DRS, opposant au régime et réfugié politique en Allemagne depuis 1995; mais on ne présente plus cet officier, auteur d’un livre-témoignage magistral intitulé : «  »Chroniques des années de sang – ou comment les services secrets ont manipulé les groupes islamistes (Denoël, Paris, 2003) »". Un livre-témoignage où il révèle par le détail, ce que soupçonnait déjà depuis longtemps, l’opinion publique algérienne mais aussi internationale, sur les terribles pratiques de la répression militaro-policière contre les islamistes. Sans que cela ne puisse en rien, excuser les crimes commis par les islamistes eux-mêmes.

Parmi  ses témoignages d’une remarquable précision, l’ex-colonel Samraoui, qui s’est trouvé au cœur du  système « opérationnel » du DRS, c’est-à-dire du terrain, a confirmé entre autres, la création ex nihilo de certains maquis dits « islamistes » et à tout le moins, la pratique des infiltrations et des manipulations partielles ou totales d’autres maquis islamistes,  les poussant à commettre des crimes abjects, pour retourner contre eux, l’opinion des  populations. De même qu’il a confirmé la responsabilité du DRS et de ses commanditaires les terribles massacres de masse des populations civiles, de Relizane à Raïs, en passant par Bentalha ou Béni-Messous…etc., Sans oublie l’assassinat du Président Boudiaf ; sans oublier les faux attentats terroristes de 1995 à Paris, en « connexion » avec la DGSE ; sans oublier les pratiques monstrueuses de la torture ou des enlèvements-liquidations-disparitions de plus de 15.000 citoyens algériens. Ce dernier chiffre allait d’ailleurs être reconnu par le général Khaled Nezzar lui-même, complètement enfoncé, déstabilisé par sa confrontation, les yeux dans les yeux avec  M. Samraoui en pleine audience d’un Tribunal français, lors du procès en ‘diffamation » (!) intenté par ce dernier contre  l’ex officier Habib Souaïdia, qui venait d’écrire de son côté « La Sale Guerre » où il enfonçait un peu plus, les généraux putschistes algériens et la redoutable machine de répression criminelle du DRS.

Pourquoi rappeler ces terribles évènements ?

Parce que j’ai appris comme beaucoup de citoyens  algériens à travers le Communiqué daté du 24 Septembre 2012, diffusé par le Front du Changement National que l’épouse de M. Samraoui qui était entrée en Algérie le 25 Août, munie d’un Document de voyage dûment délivré par autorités allemandes et régulièrement  revêtu du Visa de l’Ambassade algérienne à Berlin – dans l’impossibilité où elle se trouvait d’avoir son passeport algérien – a été empêchée de quitter le territoire national par la Police de l’Air et des Frontières, le samedi 22 Septembre au moment où elle s’apprêtait à embarquer pour l’Allemagne pour y aller rejoindre son époux et leurs quatre enfants, en ce début d’année scolaire, après avoir séjourné un mois avec ses parents en Algérie.

«  »"En vertu de quoi Mme Samraoui devrait-elle être tenue pour responsable des actes de son mari, si tant est que le fait d’être opposant au régime constitue un crime ? »" s’interrogeait le Communiqué du FCN, en se positionnant strictement sur le terrain du Droit.

Pour ma part, je voudrais ici, m’interroger sur un autre terrain : celui de la presse algérienne. Comme l’ont fait avant moi, certains intervenants sur le site « Le Quotidien d’Algérie », à propos du silence lâche et sans état d’âme sur cette affaire, dans les colonnes de la misérable presse dite « indépendante » dans notre pays

En effet, qu’il s’agisse d’Al Khabar ou d’El Watan, d’Echchorouk ou de l’Expression du Soir d’Algérie ou autres Liberté – pour ne citer que ceux-là – c’est motus et bouche cousue. Et pour cause ! L’ex-colonel Samraoui est un pestiféré, un paria, un non-citoyen, pour avoir rompu la loi de l’omerta sur les crimes de guerre commis durant la décennie noire à travers l’effroyable machine répressive mise en place par les généraux putschistes – les « dafs » –  pour broyer le peuple algérien, coupable à leurs yeux d’avoir fait le « mauvais choix » lors du scrutin de Décembre 1991. Des généraux putschistes qui se sont comme « souvenus » de leur vie antérieure,  par un étrange avatar hérité en droite ligne de leur passé de soldatesque, dans les rangs des troupes coloniales, du temps où ils combattaient leurs propres frères en guerre contre l’occupant français.

Quelle odieuse différence de traitement de l’information entre d’une part, le tonnerre médiatique  soulevé à Alger par l’arrestation à Genève en Octobre 2011, du général Nezzar, arrêté à Genève et régulièrement mis en cause pour faits de crimes de guerre par une Juridiction suisse et d’autre part, l’acte de banditisme d’Etat commis contre Mme Samraoui, empêchée de quitter le territoire national, sans qu’aucun mandat de justice n’ait été émis à son encontre ?

Qui ne se souvient de ces grotesques  éditoriaux patriotards à la gloire d’un banal soudard –  putschiste à l’occasion –  et signés par certains directeurs de rédaction jacasseurs et patriotards, en quête de reconnaissance sonnante et trébuchante sous forme d’aides, de subventions et autres contrats de publicité, distribués à l’aune de leur degré de servilité,  par un régime dont ne sait plus trop qu’est-ce qu’il est le plus, corrompu ou corrupteur ?

Qui ne se souvient de cette floraison de « pétitions de soutien » en faveur de ce faux héros, érigé en « sauveur de la république » alors qu’il n’est prosaïquement qu’un misérable criminel de guerre désormais aux prises avec la Justice d’un pays étranger. Des « pétitions » commanditées par les Services et gonflées à loisir par le tout-venant, pioché dans cette nébuleuse insondable qu’est ce demi-monde de ripoux gravitant autour des « moukhabarate », et où la frontière est si mal définie, entre l’intellectuel véreux, le politicien par accident, le journaliste par défaut, l’affairiste par corruption ou le sycophante par malédiction…

Non, décidément, ce régime n’apprendra jamais les leçons – j’allais dire les gifles – du passé, même quand ce passé est relativement récent. Il suffira de rappeler le rejet, en 2007, par la Justice espagnole, de la demande d’extradition de M. Samraoui, remis en liberté trois jours seulement après son interpellation en Espagne. Ou encore, plus près de nous,  du désaveu judiciaire cinglant en Juillet 2012, infligé au gouvernement algérien par un Tribunal parisien, dans l’affaire de la demande d’extradition du Dr Mourad Dhina. L’une comme l’autre affaire, ayant clairement révélé à l’opinion publique nationale et internationale, jusqu’où peuvent aller les forfaitures, les falsifications et les mensonges d’un régime de non-droit en pleine déliquescence et peu soucieux de l’image de notre pays à l’étranger ; un régime acculé à une fuite en avant éperdue qui signe incontestablement une peu glorieuse fin prochaine.

Post-Scriptum : C’est au moment d’envoyer cet article, à la Rédaction de LQA que M. Salah-Eddine Sidhoum m’a appris que Mme Samraoui a été enfin autorisée à repartir en Allemagne pour y rejoindre sa famille. Tout en me félicitant de cette bonne nouvelle, je maintiens telle quelle, la rédaction de cet article qui dénonce le silence de notre pseudo presse indépendante.
 
Commentaires:

Enregistrer un commentaire

Abonnement Publier les commentaires [Atom]





<< Accueil
"Si vous n’y prenez pas garde, les journaux finiront par vous faire haïr les opprimés et adorer les oppresseurs." Malcom X

Archives
février 2007 / mars 2007 / avril 2007 / mai 2007 / juin 2007 / juillet 2007 / août 2007 / septembre 2007 / octobre 2007 / novembre 2007 / décembre 2007 / janvier 2008 / février 2008 / mars 2008 / avril 2008 / mai 2008 / juin 2008 / septembre 2008 / octobre 2008 / novembre 2008 / décembre 2008 / janvier 2009 / février 2009 / mars 2009 / avril 2009 / mai 2009 / juin 2009 / juillet 2009 / août 2009 / septembre 2009 / octobre 2009 / novembre 2009 / décembre 2009 / janvier 2010 / février 2010 / mars 2010 / avril 2010 / mai 2010 / juin 2010 / juillet 2010 / août 2010 / septembre 2010 / octobre 2010 / novembre 2010 / décembre 2010 / janvier 2011 / février 2011 / mars 2011 / avril 2011 / mai 2011 / juin 2011 / juillet 2011 / août 2011 / septembre 2011 / octobre 2011 / novembre 2011 / décembre 2011 / janvier 2012 / février 2012 / mars 2012 / avril 2012 / mai 2012 / juin 2012 / juillet 2012 / août 2012 / septembre 2012 / octobre 2012 / novembre 2012 / décembre 2012 / janvier 2013 / février 2013 / mars 2013 / avril 2013 / mai 2013 / juin 2013 / juillet 2013 / août 2013 / septembre 2013 / octobre 2013 / novembre 2013 / décembre 2013 / janvier 2014 / février 2014 / mars 2014 / avril 2014 / mai 2014 / juin 2014 / juillet 2014 / août 2014 / septembre 2014 / octobre 2014 / novembre 2014 / décembre 2014 / janvier 2015 / février 2015 / mars 2015 / avril 2015 / mai 2015 / juin 2015 / juillet 2015 / août 2015 / septembre 2015 / octobre 2015 / novembre 2015 / décembre 2015 / janvier 2016 / février 2016 / mars 2016 / avril 2016 / mai 2016 / juin 2016 / juillet 2016 / août 2016 / septembre 2016 / octobre 2016 / novembre 2016 / décembre 2016 / janvier 2017 / février 2017 / mars 2017 / avril 2017 / mai 2017 / juin 2017 / juillet 2017 / août 2017 / septembre 2017 / octobre 2017 / novembre 2017 / décembre 2017 / janvier 2018 / février 2018 / mars 2018 / avril 2018 / mai 2018 / juin 2018 / juillet 2018 / août 2018 / septembre 2018 / octobre 2018 / novembre 2018 / décembre 2018 / janvier 2019 / février 2019 / mars 2019 / avril 2019 / mai 2019 / juin 2019 / juillet 2019 / août 2019 / septembre 2019 / octobre 2019 / novembre 2019 / décembre 2019 / janvier 2020 / février 2020 / mai 2020 /


Powered by Blogger

Abonnement
Articles [Atom]