ELWATAN-ALHABIB
vendredi 21 novembre 2008
 

La Grande Dépression du 21ème siècle : Désintégration de l'économie réelle




La Grande Dépression du 21ème siècle : Désintégration de l'économie réelle

Global Research, Michel Chossudovsky, 15 novembre 2008


La crise financière s’aggrave au risque de perturber gravement le système de paiement international.


Cette crise est bien plus grave que la Grande Dépression. Tous les grands secteurs de l'économie mondiale sont touchés. De récents rapports suggèrent que le système des lettres de crédit, ainsi que le transport maritime international, qui constituent la bouée de renflouage du système commercial international, sont potentiellement en danger.


Le « renflouage » bancaire, envisagé dans le cadre du fameux Troubled Asset Relief Program (TARP), loin d’être une « solution » à la crise, est « cause » de plus de débâcle.


Le « renflouage » contribue à servir le mécanisme de déstabilisation de l'architecture financière. Il transfère de grandes quantités d'argent public entre des mains de financiers privés, au détriment du contribuable. Il conduit au dérapage de la dette publique et à la centralisation du pouvoir bancaire sans précédent. Et qui plus est, l’argent du renflouage est utilisé par les géants financiers pour garantir leurs acquisitions d'entreprises, à la fois dans le secteur financier et dans l'économie réelle.


À son tour, cette concentration exceptionnelle de puissance financière accule à la banqueroute des pans entiers de l'industrie et de l'économie des services, provoquant la mise au chômage de dizaines de milliers d’employés.


Les hautes sphères de Wall Street éclipsent l'économie réelle. De grandes quantités d'argent, accumulées par une poignée de conglomérats de Wall Street et leurs associés des fonds spéculatifs (hedge funds), sont réinvesties dans l'achat de biens réels.


Les richesse de papier sont transformées en possession et contrôle des moyens de production réels, que sont notamment l'industrie, les services, les ressources naturelles, les infrastructures, etc.



Disparition de la demande du consommateur


L'économie réelle est en crise. L'augmentation du taux de chômage qui en résulte est propice à la baisse des dépenses de consommation, qui se répercute à son tour sur le volume des services et de la production de biens.


Aggravée par la politique macro-économique néolibérale, cette spirale descendante cumulative aboutit en fin de compte à une offre excédentaire de marchandises.


Les entreprises ne peuvent vendre leurs produits du fait de la mise au chômage des employés. Le consommateur, à savoir les travailleurs, a été privé du pouvoir d'achat nécessaire au maintien de la croissance économique. Avec ses maigres revenus, il ne peut se permettre d’acheter les biens produits.



La surproduction provoque la faillite en cascade


Les listes de biens invendus s'accumulent. Par la suite, la production s'écroule ; l’offre de marchandises diminue à cause de la fermeture des installations de production, notamment des usines de fabrication et de montage.


Dans ce processus de fermeture d'usines, toujours plus de travailleurs sont transformés en chômeurs. Des milliers d'entreprises en faillite sont chassées du paysage économique, provoquant l’affaissement de la production.


La misère généralisée et le déclin mondial du niveau de vie résultent des bas salaires et de la banalisation du chômage. C’est le fruit d'un régime économique mondial à main-d'œuvre bon marché préexistante, largement caractérisé par les usines d'assemblage à faible coût salarial des pays du tiers monde.


La crise actuelle couvre les contours géographiques de l'économie à main-d'œuvre bon marché, provoquant dans pays dits développés la paupérisation de grands pans de population (dont la classe moyenne).


Aux États-Unis, au Canada et en Europe de l'Ouest, la sphère industrielle entière est potentiellement en danger.


Nous avons affaire à un processus de restructuration économique et financière de longue durée. Dans sa phase initiale, démarrant dans les années 80 à l’ère Reagan-Thatcher, des établissements à l’échelon local et régional, des exploitations agricoles familiales et de petites entreprises, ont été déplacés et détruits. À son tour, le boom des fusions et des acquisitions dans les années 90 a conduit à la consolidation simultanée de grandes entités corporatives, à la fois dans l'économie réelle et dans les services bancaires et financiers.


Toutefois, dans les dernières évolutions, la concentration du pouvoir bancaire se fait au détriment des grandes entreprises.


Ce qui diffère dans cette phase particulière de la crise, c’est non seulement la capacité des géants financiers (grâce à leur contrôle déterminant sur le crédit) à créer du chaos dans la production de biens et les services, mais aussi à saper et à détruire les grandes compagnies de l’économie réelle.


Les faillites surviennent dans toutes les principales branches d'activité : fabrication, télécommunication, magasins de détail de biens de consommation, galeries marchandes, compagnies aériennes, hôtellerie et tourisme, sans parler de l'immobilier et de la construction, et des victimes de la désintégration du prêt hypothécaire à haut risque (subprime).


General Motors a confirmé qu'« il pourrait ne plus avoir d'argent liquide dans quelques mois, ce qui provoquerait l'un des plus grands dépôts de faillites de l'histoire étasunienne. » (USNews.com, 11 novembre 2008.) À son tour, cela pourrait se retourner contre la chaîne des industries connexes. L’évaluation des pertes d'emplois dans l'industrie automobile des États-Unis va de 30.000 à plus que 100.000. (Ibid).



Chute du cours de l'action General Motors


Aux États-Unis, les affaires de détail de consommation sont en difficulté : le prix des actions des chaînes de grands magasins JC Penney et Nordstrom s’est effondré. Circuit City Stores Inc a fait une demande de sauvegarde en vertu du Chapter 11. Les actions de Best Buy, la chaîne de détaillants en électronique, ont plongé.



Suite à l'effondrement de leurs valeurs boursières, Vodafone Group, la plus grande société anonyme de téléphonie mobile, sans mentionner la SA InterContinental Hotels, sont en difficulté. (AP, 12 novembre 2008). Aux quatre coins du monde, plus de deux douzaines de compagnies aériennes ont sombré en 2008, s'ajoutant à un chapelet de faillites de compagnies aériennes durant ces cinq dernières années. (Aviation and Aerospace News, 30 octobre 2008). Stirling, la deuxième compagnie aérienne commerciale du Danemark, s’est déclarée en faillite. Aux États-Unis, un nombre croissant de sociétés immobilières ont déjà déposé une demande de sauvegarde de faillite.



Vodophone. Chute du cours de l’action



InterContinental Hotels SA


Dans les deux derniers mois, aux Etats-Unis, de nombreuses fermetures d'usines ont entraîné le congédiement définitif de dizaines de milliers d’employés. Ces fermetures touchent plusieurs domaines clés de l'activité économique, notamment le secteur pharmaceutique et chimique, l’industrie automobile et ses branches affiliées, l'économie des services, etc


Dans les usines, les commandes ont énormément diminué. Une étude de l’entreprise Autodata a signalé en octobre que « la vente de voitures et camionnettes avait chuté de 27 pour cent en septembre par rapport à l’an dernier. » (Washington Post, 3 octobre 2008)



Le chômage


Selon le US Bureau of Labor Statistics, 240.000 emplois ont été perdus uniquement au mois d'octobre :

Le US Bureau of Labor Statistics du Ministère du Travail étasunien a rapporté aujourd'hui que le nombre des emplois salariés non agricoles a chuté de 240.000 en octobre, le taux de chômage passant de 6,1 à 6,5 pour cent. Tel que cela a été revu et corrigé, cette perte d'emploi salarial en octobre suivait le dégraissage de 127.000 postes d’août et de 284.000 en septembre. 1,2 millions d’emploi ont été perdus dans les 10 premiers mois de 2008, plus de la moitié de la baisse s'étant produite au cours des 3 derniers mois. En octobre, les pertes d'emplois continuent dans l'industrie manufacturière, la construction, et chez plusieurs prestataires de services industriels . . .

Parmi les chômeurs, le nombre de gens ayant perdu leur emploi et ne pensant pas être rappelés au travail, est passé de 615.000 à 4,4 millions en octobre. Au cours des 12 derniers mois, la taille de ce groupe a augmenté de 1,7 millions. [?] (Bureau of Labor Statistics, novembre 2008)


Les chiffres officiels ne décrivent ni la gravité de la crise ni ses effets dévastateurs sur le marché du travail, puisque nombre de pertes d'emplois ne sont pas signalées.


La situation dans l'Union Européenne est tout aussi inquiétante. Un récent rapport britannique indique la probabilité d’une mauvaise passe de chômage généralisé dans le Nord-Est de l'Angleterre. En Allemagne, un rapport publié en octobre suggère que 10 à 15% de tous les emplois dans l’automobile du pays pourraient être perdus.


Des suppressions d'emplois ont aussi été annoncées dans les usines de General Motors et de Renault-Nissan en Espagne. La vente de voitures neuves en Espagne a chuté de 40 pour cent en octobre par rapport aux ventes du même mois l'an dernier.



Employés du constructeur automobile Nissan manifestant devant le siège de la société japonaise à Barcelone (AFP)



Faillites et saisies : Une opération de pêche aux capitaux des géants de la finance


Parmi les entreprises au bord de la faillite quelques-unes sont des affaires extrêmement rentable. Question importante : qui prend le contrôle des droits de propriété des corporations industrielles géantes en faillite ?


Les faillites et les saisies hypothécaires sont des opérations de pêche aux capitaux. Avec l'effondrement des valeurs boursières, le prix de l’action des sociétés cotées subit une importante chute, qui affecte immédiatement la solvabilité et la capacité de ces sociétés à emprunter et/ou à renégocier leur dette (qui est basée sur la valeur cotée de leurs actifs).


Les spéculateurs institutionnels, hedge funds et autres, ont tiré profit de butins inattendus.


Ils déclencher l'effondrement des sociétés cotées grâce à la vente à découvert et autres opérations spéculatives. Ils profitent ensuite de leurs gains de la spéculation à grande échelle.


Selon un rapport publié dans le Financial Times, il est évident que l’effondrement de l'industrie automobile aux États-Unis résulte en partie de manipulations : « General Motors et Ford ont perdu 31 pour cent, à 3,01 dollars, et 10,9 pour cent, à 1,80 dollars, malgré l'espoir en un possible sauvetage par Washington de l'industrie au bord de la ruine. La chute est venue après que la Deutsche Bank ait fixé un prix cible de zéro pour GM. » (Financial Times, 4 novembre 2008)


Les financiers se livrent à une débauche de shopping. Les 400 milliardaires étasuniens de Forbes attendent dans les limbes.


Dès qu'ils auront consolidé leur position dans le secteur bancaire, les géants financiers, incluant JP Morgan Chase, Bank of America, et d’autres, utiliseront leurs gains inattendus et l’argent du renflouage qui leur est fourni dans le cadre du TARP, pour élargir leur contrôle à l'économie réelle.


La prochaine étape consiste à transformer les actifs liquides, à savoir la richesse en papier monnaie, en achats de patrimoines de l’économie réelle.


À cet égard, Berkshire Hathaway Inc de Warren Buffett est l'un des principaux actionnaires de General Motors. Plus récemment, suite à l'effondrement des valeurs boursières en octobre et novembre, Buffett a renforcé sa participation dans le producteur pétrolier ConocoPhillips, sans mentionner Eaton Corp, dont le cours à la Bourse de New York a chuté de 62% par rapport à son pic de décembre 2007 (Bloomberg).


Les cibles de ces acquisitions sont les nombreuses industries très productives et les entreprises du secteur des services, qui sont au bord de la faillite et/ou dont la valeur boursière s’est effondrée.


Les gestionnaires de l’argent ramassent les morceaux.



Propriété de l'économie réelle


Suite à ces développements, qui découlent directement de la crise financière, l'ensemble de la structure de la propriété du patrimoine de l'économie réelle est en effervescence.


La richesse de papier, accumulée par les opérations d'initiés et la manipulation des actions du marché, sert à prendre le contrôle du patrimoine économique réel, en déplaçant les structures de la propriété préexistante.


Ce dont nous avons affaire est une relation malsaine entre l'économie réelle et le secteur financier. Les conglomérats financiers ne produisent pas de marchandises. Ils font essentiellement de l'argent grâce à la conduite de transactions financières. Ils utilisent le produit de ces transactions pour prendre le contrôle de sociétés valables de l’économie réelle, qui produisent des biens et des services pour la consommation des ménages.


Dans une évolution déplaisante, les nouveaux propriétaires de l'industrie sont des spéculateurs institutionnels et des manipulateurs financiers. Ils sont en train de devenir les nouveaux capitaines de l'industrie, non seulement en déplaçant les structures de la propriété préexistante, mais aussi en installant leurs copains dans le fauteuil des gestionnaires des entreprises.



Pas de réforme possible dans le cadre du Consensus Washington-Wall Street


Le sommet financier du G-20 à Washington du 15 novembre confirme le consensus Washington-Wall Street.


Bien que présentant officiellement un projet de restauration de la stabilité financière, dans la pratique l'hégémonie de Wall Street reste intacte. La tendance va vers un système monétaire unipolaire dominé par les États-Unis et soutenu par leur supériorité militaire.


Les artisans du désastre financier, grâce à la Gramm-Leach-Bliley Financial Services Modernization Act (FSMA) de 1999, ont été investi de la tâche d'apaiser la crise qu’ils ont eux-mêmes créée. Ils sont à l’origine de la débâcle financière.


Le sommet financiers du G20 ne remet pas en question la légitimité des hedge funds ni des divers effets de commerce du marché des dérivés. Le communiqué final comporte un engagement imprécis et confus : « pour mieux réglementer les hedge funds et créer plus de transparence dans la garantie des prêts liés à des valeurs mobilières, dans le but de stopper la glissade économique mondiale. »


La solution à cette crise peut venir uniquement d’un processus de « désarmement financier, » qui remette vigoureusement en cause l'hégémonie des institutions financières de Wall Street, notamment leur contrôle sur la politique monétaire. Le « désarmement financier » nécessiterait aussi le gel des effets de commerce spéculatif, le démantèlement des hedge funds et la démocratisation de la politique monétaire. L’expression « désarmement financier » a été inventée à l’origine par John Maynard Keynes dans les années 40.



Obama approuve la déréglementation financière


Barack Obama a adopté le consensus Washington-Wall Street. Dans une tournure désagréable, l'ancien député Jim Leach, un républicain qui parrainait la FSMA en 1999 à la Chambre, est maintenant conseiller d’Obama dans l’élaboration d’une solution opportune à la crise.



Jim Leach


Jim Leach, Madeleine Albright et l'ancien Ministre des Finances Larry Summers, qui a aussi joué un rôle clef dans l’adoption de la FSMA, étaient présents le 15 novembre au sommet financier du G-20 en tant qu’équipe consultative du Président élu Barack Obama :

Barack Obama et Joe Biden, le Président et le Vice President élus, ont annoncé que l'ancienne Ministre des Affaires Étranges, Madeleine Albright, et l'ancien député républicain Jim Leach, seront disponible pour rencontrer en leur nom les délégations du G-20 lors de la réunion du sommet. Leach et Albright tiennent ces réunions non officielles pour obtenir la contribution des délégations en visite au nom du Président et du Vice President élus. (mlive.com, 15 novembre 2008)



Original : www.globalresearch.ca/index.php?context=va&aid=10977

 
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